WIM Gundula Heinatz: «Mon résultat à la Mitropa Cup est dû à un travail d’entraînement intense»

par Bernard Bovigny

Dix mois sa déception au Tournoi pour le titre des dames au CSI 2021 à Flims (image: sa partie contre sa fille Maria), la WIM Gundula Heinatz a réalisé un exploit à la Mitropa Cup en Corse.

beb - A la Mitropa Cup à Corte en Corse, la WIM Gundula Heinatz a marqué l’Année de la femme aux échecs adoptée par le FIDE par une performance de 2460 Elo et un gain de 70 Elo. Il s’agit d’un des plus grands exploits dans l’histoire des échecs féminins en Suisse. Markus Angst, chargé de communication à la Fédération suisse des échecs (FSE), a interviewé la Thounoise de bientôt 53 ans le lendemain de la dernière ronde du tournoi.

 Avez-vous déjà réalisé une performance de 2460 Elo lors d’un tournoi durant votre longue carrière?

Gundula Heinatz: Non, c’est vraiment la première fois. Durant mes jeunes années, il m’est arrivé d’être proche d’une norme de WGM et j’ai parfois disputé un bon tournoi, par exemple en 2019 à l’Open de Vienne, avec 5½ sur 9 et une performance de 2370. Mais je n’ai jamais obtenu un résultat aussi bon que celui de la Mitropa Cup.

Vous n’avez pas perdu une seul fois à cette Mitropa Cup, et vous avez réalisé trois nulles et cinq victoires. Quelle a été votre meilleure partie?

Ma victoire en première ronde contre la FM croate Ena Cvitan, cotée 121 Elo de plus que moi. Elle est la fille du Grand-Maître Ognjen Cvitan, très connu en Suisse. J’ai aussi bien joué contre l’Italienne Marina Brunello, qui a le titre de MI et qui est cotée 220 Elo de plus que moi. Cette partie s’est terminée «seulement» par la nulle, mais je l’ai dominée en milieu de partie – qui est mon point fort. J’ai bien entendu eu du plaisir avec la victoire en dernière ronde contre la WGM Zuzana Borosova, qui est mieux cotée de 148 Elo. J’ai bien joué l’ouverture et j’ai gagné un pion en milieu de partie. Puis je lui ai laissé du contre-jeu et je n’ai gagné que grâce à un sacrifice incorrect qu’elle n’a pas osé accepter.

Lors de votre dernier grand tournoi, au Championnat suisse individuel l’an dernier à Flims, vous étiez numéro 2 du Tournoi pour le titre des dames. Or, vous n’avez réalisé qu’un 50% et vous avez terminé au 5e rang, ce qui n’a pas été un bon résultat. Comment expliquez cette ascension dans votre performance entre juillet 2021 et mai 2022?

Au CSI 2021 à Flims, j’ai clairement joué en-dessous de mon niveau. En tant que numéro 2 de la liste de départ et double championne suisse, j’étais sous pression. Mais à la Mitropa Cup, je n’avais pas cette pression, ni l’équipe des dames d’ailleurs. En tant qu’équipe la plus faible, nous pouvions jouer en nous sentant libérées car nous n’avions rien à perdre. A Flims, il en était tout autrement pour moi. Et bien entendu, notre victoire surprise en première ronde contre la Croatie était l’idéal autant pour moi que pour l’équipe. Il est toujours important pour l’ambiance de réaliser un bon début de tournoi. Mais en fin de compte, mon résultat en Corse est aussi dû à un travail d’entraînement intense et conséquent.

A propos d’entraînement et de préparation: quelle a été la contribution du coach national, le MI Milan Novkovic, à cet excellent résultat de l’équipe suisse des dames et de la vôtre personnellement?

Une contribution importante! Milan Novkovic est un excellent entraîneur d’échecs à chaque intervention. Il est d’un calme exemplaire: un roc dans la tempête. Et comme son épouse Julia joue aussi aux échecs, il sait comment se comporter avec les femmes. Cela dit, il n’y pas que l’accompagnement durant le tournoi qui est important, mais aussi l’entraînement lors de la préparation. En tant que joueuses du cadre national des dames nous nous entraînons régulièrement avec Milan Novkovic par Skype et deux fois par année devant l’échiquier à Macolin. Je m’entraîne aussi avec lui en individuel. Ce travail a payé à la Mitropa Cup.

Au niveau de la performance, votre prestation en Corse correspond à celle d’une WGM ou d’un MI. Mais pour le moment vous n’avez pas réalisé de norme. Ces deux titres restent-ils d’actualité alors que vous avez 53 ans?

Mon premier but est de jouer des bonnes parties, intéressantes et stimulantes. S’il en sort des normes, je les prends volontiers et je n’exclue pas de les réaliser un jour. Mais je ne me focalise pas là-dessus.

A quels tournois prévoyez-vous de participer cette année?

D’abord en juillet, au Tournoi national du Championnat suisse individuel à Samnaun, dans le but de concourir pour le titre de championne suisse, puis en juillet/ août aux Olympiades à Chennai en Inde, et en novembre au Championnat du monde individuel des seniores à Assise en Italie.

 

Portrait de Gundula Heinatz

Date de naissance: 12 mai 1969.

Domicile: Thoune.

Club: Trubschachen.

Profession: informaticienne (Dr en informatique)

Titre: Maître internationale féminin depuis 1993

Principaux succès: 2014 et 2018 championne suisse, 1987 championne juniore de RDA, 1990 dernière championne de RDA, 1994 vainqueur de la Coupe d’Allemagne avec Dresde, 1995 championne allemande par équipe féminine avec Dresde, 2007 médaille d’argent pour sa performance personnelle au 3e échiquier au Championnat européen par équipes, 2022 meilleur résultat de toutes les participantes à la Mitropa Cup.

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